Nouveau départ pour la moitié de feu Women, qui court toujours après d’étranges élucubrations mélodiques, à la lisière du post punk arty et de la pop garage.


Au-delà de la tragique disparition du guitariste Chris Reimer, la fin du quatuor canadien Women laissa un goût amer, celui d’un immense gâchis. Les conflits internes qui ont engendré la mise en hiatus du groupe en 2010, puis le décès brutale de Chris Reimer en 2012, achevèrent définitivement tout espoir d’une reformation. L’histoire reste inachevée, alors que la formation originaire de Calgary avait indéniablement encore quelques belles pages à écrire. Il reste aujourd’hui deux albums, Women et Public Strain – parus chez Jagjaguwar respectivement en 2008 en 2010 – que l’on tient personnellement comme des paradigmes de pop dissonante, génialement débridé.

Aux dernières nouvelles, l’insaisissable guitariste et chanteur Patt Flegel s’est lancé dans une carrière solo sous le nom d’Androgynous Mind, avec un EP sorti en novembre dernier, terrain de jeu de ces fidèles délirantes expérimentations garage pop Lo-Fi. Mais depuis plus aucun signe de vie. Tandis que du côté de Calgary cela s’active : Viet Cong, la formation emmenée par l’autre moitié de Women, le bassiste Matt Flegel (frère de Patt donc) et le batteur Mike Wallace, nous présente son premier EP. Tous deux sont rejoints dans cette aventure par la paire de guitaristes Scott Munro et Danny Christiansen, inconnus par chez nous.

Outre les clins d’Å“il esthétiques appuyés à l’orient (cultivés depuis le premier album de Women), Viet Cong a déjà de quoi conquérir le cÅ“ur des fans inconsolés de leur ex « femmes ». Enregistrées au cordeau, les sept pistes de ce Cassette EP (car initialement sorti sous ce format sur le label de Chad Vangaalen [[Originellement paru uniquement en cassette et vendu en concerts, ces sept titre sortent remasterisés en vinyle (ou disponible en téléchargement), sur le label Mexican Summer (Real Estate, Lansing Dreiden…).]]) posent les premières briques d’une pop à guitares labyrinthique et désinhibée, trafiquée de bric et de brocs : Entre deux saillies de fuzz et de larsen (le finale apocalyptique de « Select Your Drone », qui démarre pourtant comme une ballade douce et mélancolique…) s’incrustent des synthés cheaps inquiétants empruntés à John Carpenter et des boites à rythme de l’air krautrock paléolithique (le bien nommé déstructuré « Structureless Design »)… ça part un peu dans tous les sens, et à la vérité, on en redemande.

Toutefois, ce goût persistant pour l’expérimentation n’est qu’une des multiples facettes du quatuor. Viet Cong n’en est pas moins un quartet rock, vibrant, et le fait entendre dès « Throw it Away », et ses larvées de guitares électriques qui sonnent comme un inédit de Wire cirka 1979. La facette mélodique de Women, transparaît par l’entremise du chant de Matt Flegel et ses lignes de basse bien rondes (le très Nuggets « Static Wall » et ses chÅ“urs hantés). Les arpèges étranges d’ »Unconscious Melody » et ses constructions surprenantes font quant à eux penser à une miraculeuse démo de David Bowie période Scary Monsters. Soit sept pistes et tout autant de directions que nous offre ce premier EP, alors même qu’un album est annoncé pour ce second semestre. Nous ne sommes donc pas au bout de nos surprises.