Inlassables troubadours des temps modernes les Hollandais volants prêchent à nouveau la bonne musique dans ce « best of » en public couvrant de 1990 à 2014. L’Europe les accueille à bras ouverts.


Européens convaincus, The Nits nous dévoilent sans crier gare un florilège de leurs nombreuses et exquises prestations lives réalisées sur le vieux continent. Ce double CD, le bien nommé Hotel Europa, est composé de 31 chansons couvrant la période 1990 (Giant Normal Dwarf tour) – 2014 (Malpensa tour). Paris, Vienne, Bruxelles, Athènes, Amsterdam, Helsinki et Rotterdam seront tour à tour visitées. Ambassadeur à vie d’une pop orchestrale et ciselée, ces orfèvres de la mélodie ont tracé la piste menant au graal musical. De nombreuses formations emprunteront un temps ce chemin avant de s’égarer, The Nits eux, détiennent depuis plusieurs décennies sa cartographie exacte. Car le spirituel Henk Hofstede, chanteur, songwriter et poête ; Rob Kloet batteur et percussionniste à la joie communicative et à la technique sure et Robert Jan Stips, pianio, claviers, chanteur et touche à tout, ont fêté leur 40 ans d’existence l’an passé. Les premiers pas de leur discographie sont sous influence post new wave (Xtc). Ils s’en démarqueront ensuite pour embrasser des sonorités plus pop et complexes tout en accentuant la palette émotionnelle. Les textes soignés, au scénario tantôt loufoque tantôt ancré dans la réalité, enfoncent le clou.

Dans les conditions du direct nos bataves ne mégotent pas. Car assister à une représentation des Nits c’est franchir un espace spatio-temporel où le temps extérieur n’a plus de prise. Comme dans un rêve, on est happé par une euphorie et une joie communicative, portée par une bande son enchanteresse à la mise en scène soignée. L’ambiance est hyper chaleureuse. On en ressort systématiquement ivre de bonheur avec l’envie irrépressible de partager cette expérience. Comment retranscrire alors cet état d’apesanteur sur un support audio ? Ce fut chose faite en 1989. Urk, leur premier live, fut d’ailleurs un des détonateurs – principalement dans leur pays – de leur montée en puissance médiatique. Mais le secret a fuité. Magnifique et intouchable ce révélateur figure encore aujourd’hui dans le top 10 des meilleurs albums enregistré en public de tous les temps.

2015 : Hotel Europa est son ricochet. La procession de leurs grands classiques (« J.O.S. Days », « Nescio », « Sketches of Spain » ou « The Train ») ne figure plus au palmarès. Qu’importe, leur histoire est fertile. Trop somptueuse même, car le choix des titres s’avère ici un crève-cÅ“ur, un triple cd se serait idéalement imposé. Construit à rebours de leur discographie on s’installe dans l’amphithéâtre du bonheur par leur dernier opus Malpensa, et ses deux représentants, l’engageant « Five Fingers » et l’électronique et Berlinois « Schwebebahn ». La prise de son est toujours aussi parfaite, claire et admirablement restituée à l’instar de son grand frère Urk.

Chansons après chansons on sillonne leur discographie en guettant à chaque étape les perles retenues : « Hawelka », « No man’s land », « The Flowers », ces titres irrésistibles, prennent toutes leurs ampleurs sur scène et s’envolent pour épouser tout l’espace. Puis survient le clair-obscur : les crépusculaires « The Long Song » et « Les Nuits », nous touchent au cÅ“ur et calment nos ardeurs. On enchaîne avec « The Red Dog » qui nous surprend au son de sa fanfare syncopée. On jubile par l’alternance de ce chaud et froid ! Mais le paroxysme est atteint sur les titres « With Used Furniture We Make a Tree » et « Rumspringa » issus de l’album 1974. Renversantes et à
l’euphorie contagieuse, ces deux chansons nous collent une pêche incroyable !

L’ouverture du disque 2 débute sur le magnifique tryptique au tempo lent et mélancolique – « Walking with Maria », « 26A », « Ivory Boy » tous extraits de The Whool. Suit le très triste « Three Sisters » unique extrait échappé d’Alankomaat. La larme à l’Å“il, on rebondi sur l’épine dorsale de ce double cd à savoir les onze extraits issus
des trois opus dA dA dA, Ting et Giant Normal Dwarf, tous plébiscités, et considérés à juste titre, comme la suite royale de leur discographie. Travaillées à l’extrême et polies en studio, ces interprétations sont magnifiées dans les conditions du live. On ne les citera pas toutes : « Apple Orchard « ; « The Infinite Shoeblack » « Ting », « dA dA dA », « Cars & Cars » !

Concert fictif soit ! Mais Hotel Europa nous propose son « rappel » (« In the Dutch Mountains »). C’est le minimum syndical pour nos comparses qui nous habituent régulièrement à une prolongation beaucoup plus copieuse ! Rebaptisé pour l’occasion « Dutch Mountains » il est le seul titre également présent sur Urk. C’est aussi le clap de fin/ Carte postale sonore et exubérante ce classique « Nitséen » met un terme à cette parenthèse enchantée de deux heures.

Décoré par la ville d’Amsterdam à l’occasion de leur 40ème anniversaire pour leur contribution au développement de la musique néerlandaise, The Nits reçoit aujourd’hui notre bénédiction personnelle.

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