Familles je vous haime !


Ben Cooper a fait parler de lui avec son précédent album, Ghost, grâce à l’utilisation d’une de ses plus belles chansons pour une publicité. La réclame montrait un artiste pop de renommée mondiale prenant un cliché de son public tandis que montait crescendo la magnifique mélopée de “Welcome Home”.
Radical Face lui permet de développer des thèmes plus intimes qu’au sein de son groupe Electric President, projet pop rock qui a vu le jour sous le label Morr Music ; seul ici aux commandes, Ben Cooper aurait en tête de réaliser une trilogie en forme de fresque familiale, un arbre généalogique mis en musique, thème cher à son cœur qui hantait déjà l’opus précédent. Les deux autres volumes s’intituleront donc The Branches et Clone, un programme pour le moins alléchant après ces racines comme entrée en matière.
Nourri aux handclaps montés en boucle, à la guitare rythmique comme seul accompagnement ou presque, The Roots est un premier volet qui laisse le timbre envoûtant de la voix de Cooper chanter la naissance de cette famille omniprésente. Le grand barbu costaud transporte l’auditeur en trois phrases mélodiques empreintes de nostalgie tranquille. Le voilà au dos de la pochette le visage maculé de glaise, comme surgissant de terre, issu de son marais natal, l’air méchant au crâne surmonté d’une couronne de carton, un petit roi des jeux de l’enfance qui a croqué une tête de mort pour blason sur son couvre-chef. Car Ben Cooper chante la famille disparue, inconnue, celle fantasmée (“Ghost Towns” en écho au titre du premier album) dont il descend en droite ligne, peut-être même en ligne sinueuse, tortueuse et torturée et qui fait peser le poids (“Pound of Flesh”) de son invisible présence.

En alternant les temps calmes et acoustiques avec ce qu’il maîtrise le mieux, à savoir rythmiques à faire dodeliner les têtes qu’ornent de mélodiques « hou hou » à reprendre en chœur, l’artiste reconstruit son passé tutélaire sous d’inquiétants auspices sans pour autant laisser l’auditeur à la porte de son histoire, le surprenant d’un lointain piano indispensable ou d’un accordéon en guise de traditions assumées.

Si de The Roots se dégagent une atmosphère pesante et des fantômes enfouis, c’est aussi pour donner corps à un album tout aussi envoûtant qu’envoûté, riche en subtiles émotions. C’est aussi là la meilleure façon d’ouvrir ce triptyque qui se veut le témoignage non plus d’une histoire intime et personnelle mais aussi un regard sur les trames complexes qui se tissent au sein des enjeux familiaux.

Le clip de “A Pound of Flesh” :