The Minus Story développe une pop psychédélique fascinante, terrain d’expérimentation à des mélodies prenant une tournure sonique surprenante, une sorte The Olivia Tremor Control en plus low-fi. Une peinture colorée saisissante.


Ce qui est fabuleux avec le pays de l’oncle Sam, c’est que la source en matière de rock ne semble jamais tarir. De manière assez régulière – environ une fois tous les deux mois, si mes comptes sont bons – un nouveau groupe sorti de nulle part émerge et met pratiquement tout le monde d’accord (par exemple : Iron & Wine, The Shins, Sufjan Stevens, TV on The Radio…).
On ne sait pas trop comment expliquer cette profusion de musiciens talentueux. Peut-être faudrait-il se tourner vers Georges Bush et son capitalisme hideux, source d’ inspiration essentielle qui pousse cette nouvelle scène underground à se surpasser créativement, histoire de montrer au reste du monde que les Etats-Unis sont capables de créer autre chose que des chaînes de Fast Food et des happy end hollywoodiens politiquement corrects?… Quoiqu’il en soit, le temps de The Minus Story semble bien arrivé.

Ce groupe a déjà sorti deux albums de manière artisanale avant que le label Jagjaguwar ne les signe pour ce troisième disque au nom bien étrange, The Captain is Dead, Let The Drum Corpse Dance (une sorte de pied de nez au Captain Fantastic d’Elton John ? ). Et ce disque est une excellente surprise.
La règle d’or chez The Minus Story semble justement de ne pas en avoir. Il s’agit bien de pop musique, mais qui sortirait fréquemment des sentiers battus. La tradition pop érudite dont s’applique à recréer scrupuleusement The Shins par exemple, n’a pas vraiment court ici : The Minus Story entend triturer au maximum le squelette de ses chansons pour aboutir à une matière sonique vierge.

La production ne ressemble à rien de vraiment existant. Vu la manière de concevoir les choses, on les rapprocherait de The Microphones pour cette cohabitation permanente entre éléments lo-fi et traitement plus professionnel de la matière. Mais là où beaucoup de groupes se vautrent magistralement dans l’expérimentation, The Minus Story conserve un fort penchant pour les mélodies sublimes.

Jordan Geiger, Nick Christus, Brian Phillips et Andy Byers ne sont que quatre mais font autant de bruit que The Polyphonic Spree. Beaucoup de choeurs enveloppent cette entreprise psychédélique où sons de cloches, gouttes d’eau et notes de xylophones se concilient à merveille. Au beau milieu de tout cet attirail de grenier, on reconnaît un peu la folie psychédélique d’un Smile et de ses mélodies célestes chères aux Zombies, comme en témoigne les ensoleillés « Gravity Pull » et « Joyless, Joyless ». On ne sait jamais trop à quoi s’en tenir avec nos quatre musiciens, « You Were On My Side », « Open Your Eyes » noircissent le tableau avec un sens de la tragédie parfaitement mis en scène.

Sur « Won’t Be Fooled Again », on croirait entendre une composition algébrique de Davide Balula, mais avec des éléments pop très distincts, puis brusquement la batterie s’emballe et propulse tout cela dans une sphère psychédélique à mille lieux du convenu. Le disque possède même une composition épique de huit minutes – limite progressif – qui rappelle un peu « The Gate Of Delirium » de Yes, amputé de sa virtuosité soporifique.

The Captain is Dead, Let The Drum Corpse Dance est un album impressionnant, passionnant qui dévoile de nouveaux mystères à chaque nouvelle écoute. Ce disque ne vous lâchera pas et semble ne pas avoir d’emprise sur le temps. Pour cela, The Minus Story aurait dù s’appeler The Neverending Story. Merci du voyage. Vole Atréju, vole !

-Le site de Minus Story

-Le site de Jajaguwar