Avant même sa sortie officielle (le 26 mai dernier), le troisième album de Grizzly Bear avait accumulé suffisamment de laudateurs à sa porte dorée (via un précédent album remarqué, Yellow House, sorti en 2006) pour obliger tout retardataire à choisir son camp, celui des suiveurs ou des détracteurs — les premiers hypés dépassant nettement en nombre les seconds de la contre-hype. Après écoutes et avec recul, la nuance semble davantage de mise. D’ambition, de recherches sonores, de méandres mélodiques, de numéros de bravoure et d’invités triés sur le volet (l’Acme String Quartet, la chorale du Brooklyn Youth Choir, l’arrangeur Nico Muhly), Veckatimest n’en manque assurément pas, et parvient sans peine à se hisser au-dessus de la mêlée folk-pop annuelle. À l’horizon, le chef-d’oeuvre annoncé. À l’arrivée, du talent à revendre, mais la ligne d’horizon de demeurer toujours à distance, tellement proche et inaccessible à la fois. La faute aux chansons. Intéressantes mais pas vraiment transcendantes. Longues en oreille mais pas vraiment goûteuses. Faibles en mélodies durables (“Two Weeks”, “While You Wait For The Others”). Il y a chez ce Grizzly Bear aux griffes rentrées un côté bon élève bien peigné, ennuyeux à force de sérieux, fatiguant à force de gamberger. Dans le créneau qui est le sien — du folk à la sauce Warp, label en déshérence –, le groupe brooklynois se distingue sans toutefois imposer sa raison d’être. Passé le stade de la découverte et le plaisir de se perdre, cette musique qui, dit-on, se mérite (écouter plus pour gagner plus), qu’à t-elle vraiment à offrir, à faire entendre ? Un condensé d’explorations, des enjeux sans jeu, une modernité comme faire-valoir. C’est beaucoup et encore trop peu.

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