Un nom tarabiscoté, une pochette moche digne du Pavement grande époque. Big Chief Mkuja est une entité secrète débarquée de nulle part qui donne aux adeptes de lo-fi toutes les raisons d’avoir à nouveau le sourire.


Parfois, il arrive que l’on tombe amoureux d’un groupe sur la foi d’un seul titre entendu d’une oreille distraite. S’en suit alors l’écoute plus ou moins assidue du reste de l’ouvrage et là : soit notre amour se trouve un poil déçu, soit totalement conforté dans son idée première. Big Chief Mkuja, avec son album intitulé Iceberg, appartient à la seconde catégorie. Ne nous demandez pas d’où vient ce groupe, on vous répondra simplement de manière évasive que celui-ci vient de quelque part, du côté du sud ouest de l’Angleterre (Bath?). Pour le reste, Big Chief Mkuja vient aussi très certainement de la lune. D’une planète en tout cas où l’on aimerait se poser bien plus souvent tant l’écoute de cet album ressemble à des (re)trouvailles bienheureuses avec de lointaines connaissances perdues de vue de longue date. Mieux: on se prend à nouveau à espérer aimer un groupe, sans conditions, ni chipotage. Vous savez, comme lorsqu’il nous arrive parfois de trier un peu ce que nous avons dans l’assiette afin de glisser sous la nappe les quelques morceaux de gras indésirables…

Notre attention pour cette curieuse entité qui semble prendre un malin plaisir à brouiller les pistes (clips farfelus, site internet quasi inexistant…) s’est tout d’abord portée sur le titre « Mermaid ». Un titre « home made » comportant des voix délicieusement baltringues ainsi qu’un clavier fantastiquement foutraque servant à tisser une trame sonore psychédélique bon marché. Sans parler de ce clip maison à rendre Ariel Pink vert de jalousie!
Bidouillé avec trois bouts de ficelle, cet album sorti sous le manteau en début d’année pourrait sonner un peu comme si The Beta Band, à l’instar de Syd Barrett, s’était laissé aller à trainer en chaussettes toute la journée avant de se décider entre deux passe-temps à enregistrer à la sauvette les quelques bonnes idées qui lui trottaient dans la tête. Un disque fabriqué en cours d’art plastique par de sales gosses (Jack Godwin? Mike Ware?), plus habitués certainement à sécher l’école pour aller fabriquer des cabanes en carton avec Jad Fair et R. Stevie Moore, qu’à prendre sagement des notes assis à leur pupitre. Amusez-vous malgré tout à shooter dans leur bric-à-brac de fortune et vous verrez que le tout tient parfaitement bien.

Comme ce titre intitulé « Surprise », prêt à nous jouer un sacré tour en nous attrapant par le collet dès l’apparition de son refrain crève-cœur (You can make houses out of bricks and stones, You can make heroes out of flesh and bones, You can find answers to the great unknown, But you can’t live without love), qui contraint l’auditeur à garder désormais le doigt collé éternellement sur la touche repeat. « Cosmic Drone » pour sa part pourrait s’apparenter à la rencontre imaginaire entre The Clean et MGMT qui auraient eu l’idée de se retrouver ensemble pour jouer tous deux à l’ombre d’une cave humide. De plus, ce n’est pas parce que cette œuvre est un disque fauché que celui-ci se croit exempté de présenter des titres particulièrement inspirés. Comme ce « Noemi », vaporeux qui s’attache à vos basques comme un chewing-gum mou pour finir par ne plus vous lâcher la grappe.

Naviguant depuis (trop ?) longtemps en solitaire dans les eaux troubles du web 2.0, fort heureusement cet Iceberg s’est décidé un jour à émerger pour venir à notre rencontre. Big Chief Mkuja mérite de devenir plus gros que ça, parce que vous savez quoi? Ces gars-là, malgré un dilettantisme proche du poil dans la main, savent écrire de sacrées bonnes chansons !

Big Chief Mkuja – Mermaid

Big Chief Mkuja – Cosmic Drone

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